Réalisation : Pietro Germi
Scénario : Pietro Germi et collaborateurs
Date : 1964Durée : 118mn
Acteurs principaux :
Stefania Sandrelli : Agnese Ascalone, la séduite
Saro Urzi : Don Vincenzo Ascalone, le père
Aldo Puglisi : Peppino Califano, le fiancé
Lando Buzzanca : Antonio, le frère benêt
Léopoldo Trieste : Le baron suicidaire
Paola Biggio : Mathilde, la sœur délaissée
Attilio Martella : Le juge
Umberto Sparado : Le cousin juriste
Salvatore Fazio : le curé Mariano
SA
Mots clés : patriarcat – machisme – famille – hypocrisie – lâcheté
Pietro Germi présente avec sa causticité habituelle le machisme sicilien, prototype des sociétés patriarcales, telles qu’elles fonctionnaient avant 1968. « Séduite et abandonnée », distribué en 64, sera suivi, deux années plus tard, d’une critique de la même veine, avec « Ces messieurs-dames » à l’intention des italiens de Nord.
Dans un village de Sicile inondé de soleil, Peppino, jeune homme au regard obtus et cependant inquiet, saisit l’occasion de la sieste suivant un repas dominical pour abuser d’Agnese, la jeune et jolie soeur de sa fiancée, la niaise Mathilde. Quand l’histoire est connue du père, Don Vincenzo, le chef de famille bat sa fille, la séquestre dans sa chambre, et exige que le jeune homme répare son forfait en épousant celle qu’il a séduite et engrossée. Peppino ne veut rien entendre. À ses yeux, la jeune fille a prouvé son inconduite. Elle ne saurait être sa femme.Tout le reste de l’histoire est une suite de rebondissements plus grotesques et cocasses les uns que les autres. Les scènes mettant en jeu un baron désargenté, à la dentition calamiteuse, ou celles impliquant un juge et son greffier sont particulièrement savoureuses.
Tout est bien qui finit bien. Les jeunes gens qui se détestent sont mariés en grande pompe par le curé. Don Vincenzo, cependant, ne survit pas à l’épreuve. Qu’importe ! Un buste avantageux décore sa tombe, mentionnant les valeurs sacrées : Honneur et Famille.
Mettre à mal le machisme et la famille patriarcale
Le film a l’intérêt, tout en suscitant un rire de protection, de montrer l’état des mœurs familiales, avant l’entrée dans notre modernité actuelle. Prétendre que le machisme a disparu des relations familiales dans notre société serait aventureux. Les violences faites aux femmes, aux mineurs (Agnése n’a que 16 ans) sont malheureusement banales. Les patriarches ont disparu. La bêtise perdure. Les addictions confortent les violences intra-familiales, justifiant des « mains courantes » et des conséquences juridiques lourdes. Les violences intrafamiliales sont encore loin d’atteindre la publicité des plaintes et des faits divers.
Consolation : ce film se caractèrise par une liberté de ton et de description, à l’origine d’un comique aujourd’hui disparu. Plusieurs des personnage de ce film font partie de l’histoire du cinéma italien. Sarau Urzi incarne un chef de famille inoubliable tout comme Léopoldo Trieste donne l’image d’un aristocrate désargenté et dégénéré. Agnése, eau dormante n’est pas mal non plus, en dépit de son statut de victime.
Ce film pédagogique nous éloigne du politiquement correct habituel. Il a un côté sain en n’épargnant personne, sans enlever son humanité à qui que ce soit.