Réalisation : Ernst Lubitsch

Date : 1946 / USA

Durée : 112 mn

Acteurs principaux :

Gene Tierney : Martha

Don Ameche : Henry Van Cleve

Charles Coburn : Hugo Van Cleve (le grand-père)

Laird Cregar : son « excellence », le Diable

Eugène Pallette : E.F. Strabel, père de Martha

Louis Calhem : Randolph Van Cleve, père de Henry

SA/ HA

 Mots clés : Infidélité – Couple − Amour – Mort – Humour

 

Ernst Lubitsch est un juif allemand, immigré aux USA en 1923 à l’âge de 30 ans. A son arrivée, il a déjà la notoriété d’un comique du Muet. Il a réalisé plusieurs films pendant la première guerre mondiale pour soutenir le moral des troupes germaniques. Il est cependant déchu de sa nationalité allemande en 1935 par le régime hitlérien, ce qui lui permet, comme citoyen de son pays d’accueil, de poursuivre sa carrière de réalisateur de comédies jusqu’à sa mort en 1947, à 55 ans. Le ciel n’a pas trop attendu pour lui…

Un vieux monsieur distingué se présente spontanément à la porte de l’Enfer. Il est reçu obligeamment par son « Excellence », le Diable en personne. Ce dernier manifeste son professionnalisme en demandant au postulant d’argumenter sa conviction de justifier sa demande…  Une vraie posture de psychothérapeute.

L’humour et la mort

Henry Van Cleve a été l’unique héritier d’une famille new-yorkaise fortunée. Usant et abusant de l’adulation de sa mère et des largesses familiales, il se soucie de « gagner sa vie » comme d’une guigne.  Il préfère courir les danseuses de revue. Il ne tarde pas cependant à éprouver un coup de foudre pour Martha, à qui Gene Tierney prête ses yeux et sa grâce. La jeune fille est sur le point de se fiancer… au cousin d’Henry, un jeune avocat satisfait de lui-même et ennuyeux à mourir. Martha est prête à ce sacrifice confortable pour quitter son rustique Kansas et sa famille de magnats du bœuf en conserve.  Avec un aplomb et un brio irrésistibles, Henry séduit la jeune femme et l’enlève le soir même de la rencontre des deux familles. Celles-ci ne manquent pas de pittoresque. Le couple parental de Martha pratique une cohabitation très tendue, compatible avec un bel appétit de nourriture et de lecture choisies. Papa et maman Strabel, propriétaires du label Strabel, sont, effectivement, tous deux amateurs de crêpes à la marmelade et de bandes dessinées à épisodes, de part et d’autre de leur longue table de parvenus. Les parents d’Henry sont unis par les liens sacrés d’une stupidité harmonieuse. Contraste : le grand-père Hugo se révèle facétieux et transgressif, inconditionnel de son petit-fils dont il envie secrètement la liberté de vie.

Las, le sincère et profond attachement d’Henry pour Martha ne la préservera pas de l’infidélité de son époux. Henry a besoin de se rassurer en séduisant. Martha lui confiera qu’elle avait su qu’il lui appartenait désormais en constatant la naissance d’un léger embonpoint chez son volage époux.

La mise en scène, les personnages et les dialogues donnent la possibilité d’une réflexion douce et tendre sur l’amour, le vieillissement et la mort. La tendresse et le sourire sont très présents dans ce film. Lubitsch permet au grand public de rire des riches qui ont des dollars plein leur poche et jusque sous l’oreiller. Sa bonhommie irrévérencieuse se vérifie dans le personnage très équitable de son Excellence, le Diable.

La mort n’est pas un drame, nous suggère Lubistch. Elle est juste une cause de chagrin transitoire quand le disparu, célébré pour l’occasion, valait le coup. Place aux jeunes, en quelque sorte, et place au Ciel pour ceux qui n’ont pas oublié d’être vivants quand ils étaient sur Terre.

Un message pour les alcooliques ? Le ciel peut attendre mais, tout de même, sachez que votre temps est compté. Faites-en le meilleur usage possible !

Message complémentaire aux partisans du trans-humanisme : Allez-voir son Excellence en confiance. Elle saura certainement trouver une solution appropriée à votre quête d’éternité.