lundi 2 juillet 2012

Une personne qui me connaît bien m’a dit, à propos de certaines anecdotes, que je pouvais donner l’impression de manipuler. Il en a résulté un dialogue que je souhaite proposer au groupe.

Il existe une profusion de littérature sur la question de la manipulation mentale. Nous avions proposé il y a quelques mois, à une réunion du jeudi, un questionnaire de repérage du « narcissique pervers ». Il n’est pas question pour cette séance de se livrer à une quelconque compilation. Risquons-nous plutôt à penser par nous-même de telle manière que chacun puisse progresser à partir des prises de parole et de la réflexion qu’elles suscitent.

Comment définir un manipulateur ? Je me risque à une définition relativement neutre : c’est quelqu’un qui mobilise chez l’autre des caractéristiques dans un but dont celui-ci n’a pas conscience pour une finalité qu’il ignore. Cette façon d’être illustre une forme de relation à l’autre.

Un manipulateur est-il nécessairement quelqu’un de machiavélique, qui agit consciemment, au mépris de l’autre ? Pas nécessairement. En l’absence de confiance suffisante dans la relation, dans l’autre et en soi, on peut être tenté par la manipulation et les attitudes qui s’en rapprochent.

Il existe en chacun de nous, des forces inconscientes qui conduisent à des attitudes manipulatoires ayant l’autre ou soi-même comme objet. On peut en prendre conscience par la répétition des situations : curieux de se lier consécutivement à des personnes ayant le même type de personnalité, alors même que la dite personnalité a été une source de grandes difficultés…

Pour autant, toute intentionnalité justifie-t-elle le terme de manipulation ? Le soin, par exemple,  peut-il se passer de la suggestion, voire de l’illusion ? J’ai essayé de répondre en me prenant comme objet d’étude. De façon délibérée et réfléchie, j’utilise divers moyens d’apprivoisement, d’amélioration de la relation thérapeutique afin que celle-ci ait de bons effets pour l’intéressé. J’aggrave en quelque sorte mon cas en laissant jouer l’intuition pour inventer des micro-actes thérapeutiques.

Exemple : un patient à la pensée opératoire, abstinent depuis plusieurs années après une pancréatique qui aurait pu le tuer mais qui l’a rendu diabétique, arrive en se plaignant de la chaleur à la consultation. Il me demande de l’eau fraiche. Je descends chez moi pour remonter une bouteille de Pierrier, ce qui nous permet de trinquer et de converser en vidant deux ou trois verres.

Il est clair que j’ai des objectifs de vie et que j’essaie de les atteindre, mais je veille à ce que mes actes s’inscrivent dans le droit fil de mon éthique personnelle. J’adopte souvent des positions de compromis sur la base de contrats que je suis prêt à valider unilatéralement : « Je m’engage à », l’autre est libre de le refuser et de s’éloigner. Si des gens espèrent obtenir de moi plus que ce que je ne peux consentir, c’est leur problème et pas le mien.

Alors, quelle place la manipulation a-t-elle dans votre vie ?