Lundi 11 06 2018

Ce propos d’un confrère médiatique m’a été rapporté.

C’est quoi, un psychiatre positif ? Peut-être, pourrions-nous adopter comme devise : « Á quelque chose, malheur est bon ? ». Il est évident que les phénomènes de dépendance alcoolique m’ont conduit à rencontrer des personnes remarquables, qui m’ont permis de survivre, d’apprendre, d’évoluer et de devenir ce que je suis. La fable du « citoyen exemplaire » montre que la société, à travers de très nombreux corps de métier, est également redevable à toute ces personnes qui font leur malheur en cherchant à se faire du bien, ou tout au moins à éponger leur souffrance.

Plus sérieusement, en quoi sommes-nous en désaccord avec « la pensée positive » ? La première critique qui vient à l’esprit est que cette position n’épouse pas le mouvement naturel de l’intelligence. Pour surmonter une difficulté et résoudre un problème, il est indispensable d’écouter, d’observer, d’analyser, de saisir les contradictions et les opportunités pour imaginer des solutions. Ce n’est qu’au terme de cette mise en examen qu’il devient possible de concevoir des réponses constructives, dans la mesure des possibilités. Le Principe de réalité ne peut être escamoté pour atteindre, plus vite et sans effort, apaisement, satisfaction et bien-être. Peut-être faut-il rappeler la définition de l’ironie selon Jane Austen ? Ce sentiment consiste à conjuguer deux jugements contradictoires et puis à faire de leur contradiction, avec un sourire, un jugement nouveau.

En psychothérapie, les sentiments négatifs doivent être accueillis sans les censurer. Ils doivent pouvoir être dégagés de leur gangue émotionnelle. La décantation étant réalisée, ils peuvent devenir une source de bonne énergie. C’est ainsi que la colère peut susciter le refus de l’inacceptable, l’entrée en résistance et la solidarité. La honte peut évoluer en fierté une fois les changements utiles opérés. La haine peut déboucher sur le détachement et l’indifférence. L’obsession du besoin peut grâce aux frustrations acceptées susciter l’élan du désir.

La psychothérapie n’est pas, en alcoologie, la poursuite de l’aveuglement et de l’anesthésie par un autre moyen que l’alcool. Elle se distingue de la Méthode Coué. Elle repose sur une éthique de la bienveillance et du courage.

 Quel est votre sentiment sur la « pensée positive » ?