Lundi 10 décembre

 L’actualité donne un intérêt particulier à cette expression qui fait partie de notre vocabulaire. Pour mémoire, un article signé conjointement avec Yvan Lacombe pour la revue de la Société française d’alcoologie, - « Les cercles de résilience » - situe « les bruits et la fureur du Monde » à la périphérie des centres d’intérêt d’une personne en quête de cohésion mentale.

Il n’est sans doute pas inutile d’aller plus loin dans les explications.

Un premier niveau de correspondance implique les « informations » : faits divers, petits et grands événements de notre planète. La position que nous défendons est de ne pas être à la remorque d’informations destinées avant tout à nous troubler, à nous inquiéter et à nous distraire de ce qui est réellement important pour nous et qui demande, de notre part, réflexion et action. Nous avons certes, à éviter d’être sourds et aveugles à ce qui se passe autour de nous et qui pourrait représenter une source de problèmes. Nous devons cependant éviter les opinions formées à la va-vite. À l’époque de communication et de manipulation intensives qui est la nôtre, il est très difficile d’avoir une opinion documentée qui colle à la réalité. Une multitude de faits et de changements interviennent chaque jour, sans  que nous ayons la moindre prise sur eux, alors qu’ils conditionnent notre quotidien. Petite illustration : j’ai eu l’occasion, ces dernières semaines, de fréquenter plusieurs hôpitaux et cliniques. J’ai été confronté au même phénomène : des labyrinthes de couloir avec des panneaux indicateurs et des flèches, sans personne à qui parler.

Les questions que l’on doit se poser devant tout problème de société sont les suivantes : « De quoi s’agit-il vraiment ? Que puis-je en penser ? Puis-je faire quelque chose et quoi ? ». La méfiance relative « aux bruits et à la fureur du monde » ne concerne pas le fond du problème. Elle vise la difficulté à rester centrés sur nos priorités essentielles.

Pour la personne qui connait ou a connu une souffrance mentale associée ou non à une addiction, l’essentiel est de se donner les moyens de retrouver la « seigneurie de soi-même », selon un des thèmes exposés lors de notre conférence du 7 décembre. Satisfaire au mieux cette préoccupation permet d’agir au mieux sur nos différents cercles relationnels.

Petit exemple de la consultation de ce matin. Cette jeune femme a connu une période de quelques années de dépendance à l’alcool. Après quelques années, elle choisit d’être abstinente du lundi au samedi, grâce à la prise d’Espéral, et consomme très modérément au repas du dimanche qu’elle partage avec son conjoint. Je lui ai fait remarquer que son équilibre actuel dépendait de plusieurs acceptations : d’abord, prendre ce médicament six jours sur sept, ce qui signifie qu’elle accepte de ne pas consommer avec modération pour le quotidien. De surcroit, son équilibre dépend de deux autres choix : ne pas avoir d’enfant, ne pas travailler à l’extérieur, en dépit des revenus modestes de son conjoint. Cet exemple montre qu’aucune généralisation n’est possible, que tout est affaire de cas particuliers et d’accompagnement adapté. La conduite de vie qui nous convient est ainsi souvent éloigné des « bruits et de la fureur du monde ». Cette attitude de sagesse est plus difficile à faire vivre que les comportements inspirés par l’air du temps.

Ainsi, dans la vie de notre association, j’ai pu observer deux attitudes, celle qui se préoccupe du bruit et de la fureur du monde, ramené à notre activité, et celle qui s’en tient à l’essentiel, faire ce qui importe le plus pour notre avenir immédiat, tout en poursuivant un travail de réflexion personnelle dans le cadre de nos activités ou ailleurs.

Quelle est votre position face au bruit et à la fureur du monde ?

Vous appliquez-vous à toujours distinguer entre l’important et l’accessoire et, si vous vous déterminez pour l’accessoire, comment l’expliquez-vous ?