lundi 7 mai 2012

Le « facteur humain » est une expression employée par les sociologues du travail pour désigner ce qui au-delà de l’organisation détermine la réussite ou l’échec d’une entreprise. Par extension, l’expression peut s’appliquer aux positionnements propres aux individus immergés dans un groupe : une association, une famille, une catégorie professionnelle, une société…

Le facteur humain a un côté imprévisible qui fait la différence.

Ne pas en tenir compte est la garantie de déconvenues.

Pour les lecteurs, la lecture du titre éponyme de Christophe Dejours, s’impose (Que sais-je ? puf, 5ème édition. 2010). C’est un petit livre, très condensé, y compris du point de vue de la lisibilité.

Pour les cinéphiles, on peut citer Ultime razzia (The killing) de Standley Kubrick, paru en 1956, à partir d’un roman de série noire. Killing a deux sens en anglais, celui de « tuerie » et celui de « rafler une mise » au jeu. En l'occurrence, l'histoire est celle d'un casse des caisses des paris d'un champ de courses, un jour de grande affluence. Il est organisé de façon méthodique, « scientifique », par le « héros », récemment sorti de prison. L’appât du gain permet de réunir les protagonistes utiles au projet. Hélas pour les voleurs, le facteur humain intervient sous la forme du bavardage intempestif d’un des complices sous l’influence de sa femme habile à lui tirer les vers du nez. Et le beau projet tournera à la catastrophe.

Comment prendre en compte notre « facteur humain » sans que cela nuise aux intérêts de nos groupes d’appartenance ?

Comment faire fructifier nos capacités d’inventivité, d’ingéniosité, notre expérience dans le cadre de nos milieux d’appartenance et de nos activités ?

Une démarche visant à se libérer de l'emprise de l'alcool à des implications collectives. Comment établir l’équilibre entre ce qui est nécessaire à chacun et ce qu’attendent nos groupes d’appartenance ?

7 Mai 2012

Le changement intervenu, hier, au sommet de l'État va réjouir les uns, attrister les autres et en laisser indifférents encore d'autres.

D’un point de vue alcoologique, nous pourrions nous risquer à une métaphore : le changement de président équivaut à une démarche de sevrage à son tout début. Rien ne dit que ce changement sera suivi d’effets significatifs et durables.

Les résistances demeurent, aussi vives au sein du pays que chez le sujet à peine abstinent, à peine sorti des signes physiques du manque. Il existe autour de lui autant de faux-amis empressés à lui faire partager une bouteille. Il y a ceux de l’entourage qui ne lui font pas confiance et quelques-uns qui le félicitent comme pour mieux l’emprisonner dans des promesses qui n’ont pas lieu d’être. Il a en lui ses propres démons et autour de lui la même méconnaissance de la problématique, sans parler des bénéfices secondaires passés et à venir.

En matière de politique vis-à-vis de l'alcool, de nombreux combats aussi difficiles les uns que les autres sont à mener.

Pour l’heure, nous sommes relativement isolés. Les fédérations d'addictologie sont centrées sur les avantages acquis et sur le soin de substitution proposée aux toxicomanes. Les centres d'addictologies publiques qui s'occupent principalement de personnes alcooliques souvent marginalisées nous perçoivent comme des rivaux indésirables. La haute administration est dirigée par des fonctionnaires opposés à toute dynamique de terrain, surtout quand celle-ci exerce à partir du secteur libéral. La Société Française d’Alcoologie est solidement verrouillée, fermée à toute approche clinique et à tout changement d’organisation. Il en est de même de la plupart des structures d’addictologies privées régionales, exceptées quand il s’agit d’assurer les prescriptions ou les suivis dont elles ne veulent pas s’encombrer. Il a été peu question de la Santé dans les débats publics. La problématique alcoolique n’a pas été citée, ce dont on peut se réjouir car nul doute que le discours aurait été celui du « fléau » et de donner un peu plus de moyens pour la « prévention ».

Pour paraphraser Bracke-Desrousseaux, helléniste et socialiste marxiste décédé au début des années 50 : « Enfin, les difficultés continuent ». Un autre résultat que celui intervenu le 6 mai aurait, effectivement rendu impossible la poursuite du rêve : créer en France des conditions plus favorables à un soin efficient pour les populations en difficulté avec l’alcool. Comme vous le voyez, rien de révolutionnaire en apparence dans notre projet d’alcoologie.