29 Juin 2020

Cette réunion de rentrée coïncide avec la phase finale de la rédaction de l’écriture d’« Anesthésie générale », ouvrage visant à manifester notre esprit critique.

La pandémie encore d’actualité a suscité et suscite des peurs. Elle a donné une force nouvelle à une sensibilité apocalyptique. De nombreux travaux attesteraient que nous sommes entrés dans « l’anthropocène ». L’écosystème terrestre serait menacé par la prolifération humaine et ce qu’elle suscite de nuisances en termes d’épuisement des ressources non reproductibles, de pollution, de réchauffement climatique, de raréfaction de la vie animale et végétale. Certains chercheurs ont même émis l’hypothèse que des agents viraux mortifères pourraient se propager à partir des bouleversements climatiques induits.

Ces débats ne sont pas près de se clôturer. La thématique de la décroissance tente de progresser en audience depuis …une cinquantaine d’années. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle a peu influencé la logique productiviste et marchande. Comment pourrions-nous comprendre et intégrer l’option de décroissance sans ce que cela contredise notre philosophie d’épicurisme citoyen ?

Un certain nombre de malentendus doivent probablement être évacués. Nous sommes logiquement attachés à ce qui constitue, à nos yeux, la qualité de la vie. À quoi tenons-nous ? La discussion est ouverte. Il n’est pas certain que nous soyons d’accord sur les mêmes priorités.

Pour rester fidèle à notre philosophie, nous mettrons en tête l’exercice de notre liberté et de notre indépendance, si malmenées par le confinement et, en règle générale, par la tournure prise par l’ordinaire de la vie en collectivité. La contrepartie de l’attachement à notre liberté est le souci de ne pas nuire et de ne pas se nuire. La difficulté de ce compromis permanent n’échappe à personne. En tout cas, ce principe est un guide pour nos choix de vie.

Comment nous accorder à l’objectif de décroissance, le critère économique n’est pas le seul à prendre en compte, même si en soi il est déjà révolutionnaire. Prendre l’option inverse de celle de l’obsolescence programmée suffit à tracer une ligne de démarcation entre productivistes et épicuriens.

Un second aspect se rattache, paradoxalement, au travail, au sens large du terme. Pour un épicurien, il est indispensable d’inverser complétement la logique productiviste qui est de faire plus avec le moins de personnes possibles. Une seconde ligne de rupture intervient donc face à la logique libérale, qui consiste à privatiser les profits et à socialiser les pertes en tout genre, avec, comme effet, un accroissement sans fin de la population marginalisée.

Les crises financières les plus récentes ont montré que l’argent était l’instrument de domination du pouvoir financier, de 0,1% de la population, estime-t-on, au mépris de toute autre logique écologique, sociale ou humaniste.

L’informatisation de la société et les progrès en robotique ont éliminé du travail socialement utile un nombre invraisemblable de personnes qui auraient trouvé dans le travail : identité, épanouissement et plaisir. La plupart des emplois octroyés sont à l’opposé de la valeur-travail. L’emploi, dans ces conditions, génère l’ennui, l’insatisfaction et paradoxalement l’épuisement. Pour un épicurien, une contre-révolution numérique s’impose.

La reconquête et le bon usage du temps libéré est le dernier élément pouvant justifier le concept de décroissance. Il va de soi que les humains n’ont nul besoin de multiplier les déplacements sur la planète ou de communiquer en permanence, comme s’ils avaient horreur du silence et de la tranquillité ou un compte à régler avec la culture critique.

Une chose est certaine, la décroissance ne peut être l’alibi d’une régression sociale généralisée avec un « serrage de ceinture » inversement proportionnel à la situation sociale. Il apparait, enfin, évident que la mise à l’écart des addictions nous fait prendre le chemin d’une décroissance épicurienne.

Que pensez-vous de cette notion de décroissance ?

Comment l’appliquez-vous à votre vie ?