Réalisation : Pedro Almodovar

Scénario : Pedro Almodovar

 Date : 2021

Durée : 90 mn

Acteurs principaux :

Pénélope Cruz : Janis

Milena Smit : Ana : la jeune mère

Altana Sanchez-Gijon : Térésa, la mère d’Ana

Israel Elejalde : Arthuro

Rosy de Palma : Eléna

A / SA

Mots clés : Filiation – mère – fille – famille - couple

 

 

Le scénario de Madres paralelas repose sur deux histoires intriquées : celle d’une erreur d’attribution de nouveaux nés dans une maternité, celle de la recherche de restes d’hommes tués par le régime franquiste. Janis est à l’intersection de ces deux problématiques. Photographe professionnelle, elle est tardivement mère célibataire, alors que la très jeune Ana accouche le même jour qu’elle. Le doute sur l’origine du bébé de Janis s’amorce avec le père présumé, Arthuro qui ne se reconnaît pas dans le nouveau-né. Ce doute aboutit à la preuve génétique obtenue par Janis que l’enfant n’est pas le sien Elle comprend par la même méthode que l’enfant d’Ana est le sien. Ce dernier, victime de la mort-subite du nourrisson a été résultat de sa rencontre avec Arthuro. La petite fille dont elle s’occupait avec amour, en dépit de ses traits amérindiens, est l’enfant d’Ana. Arthuro est anthropologue, motif du rapprochement de Janis, en quête de retrouver les restes d’un grand-père tué et enterré on ne sait où par les franquistes. Il avait été empêché d’aller plus loin dans la relation amoureuse en raison d’une épouse malade d’un cancer… De son côté, Ana, a été rejetée par son père quand elle a été enceinte, après une soirée alcoolisée avec des garçons. Elle n’a pas davantage été entourée par sa mère qui a choisi sa vie d’actrice, après une réussite qui lance tardivement sa carrière.

Le double désarroi de ces femmes aboutit à ce qu’elles aient une relation homosexuelle qui tourne court quand Janis révèle la vérité, un temps cachée, à Ana. Arturo revient porteur des nouvelles sur l’endroit où les restes du grand-père sont enfouies. Tout est bien qui finit bien, après un retour sur les lieux de l’enfance de Janis et les retrouvailles des ossements des fusillés. La famille peut faire son deuil. Ana, son bébé et son actrice de mère sont réunis. Janis est de nouveau enceinte d’Arthuro qui s’est séparé de sa femme.

La filiation en question

La réalisation du film est irréprochable. Les acteurs, spécialement Pénélope Cruz, jouent juste. L’intrigue, malgré les péripéties, tient debout. L’obsession du deuil à satisfaire peut se comprendre, même si, à une telle distance de l’événement, on puisse s’étonner de sa persistance.

Almodovar décline la question de la filiation.

Arthuro, physiquement, ne se reconnaît pas, à juste titre, dans le bébé que lui présente Janis. Celle-ci semble se détacher assez facilement de l’enfant quand elle sait qu’elle n’est pas la mère. Inversement, Ana devient mère dès qu’elle le sait.

La famille de Janis est un exemple de lien vivant entre plusieurs générations, à travers les récits. La relation homosexuelle de Janis et d’Ana, reflet de leur désarroi respectif, s’achève avec la clarification des maternités.

Arthuro et Janis concrétise leurs sentiments affectifs en concevant un second enfant. Leur sentiment amoureux s’est développé en bénéficiant de l’ambiance familiale pluri-générationnelle dans laquelle se meut Janis. Elle retrouve avec plaisir sa maison natale à la disposition mobilière inchangée. Elle la fait partager à Arthuro. Pour Ana, cette maison est vieillotte et sans intérêt, ce qui souligne le fossé entre générations. Il y a de l’Œdipe féminin dans l’attraction exercée par Janis sur Ana.

Ce film d’Almodovar fait réfléchir, paradoxalement, aux évolutions récentes des mœurs. Il y aurait donc encore des attachements familiaux pluri-générationnels, une quête d’identité familiale, une attirance instinctive de la mère et, même, du père pour l’enfant, à l’époque des tests génétiques et du « baby business ».

Question alcools et addictions, la mère de Janis a disparu des conséquences d’une overdose « festive », à Ibiza. Janis avait 5 ans. Elle a dû son développement affectif à sa grand-mère. Le bébé d’Ana est le résultat d’une alcoolisation, également « festive », de la jeune Ana avec trois garçons, le père, identifiable sur la photo souvenir, et deux autres jeunes qui ont pu abuser et d’obtenir une nouvelle relation sous l’effet d’un chantage vidéo filmant les ébats contraints.