Réalisation : Luigi Comencini

Scénario : Luigi Comencini et d’autres

Date : 1968                            Italie

Durée :  108mn

Acteurs principaux :

Nino Manfredi : Natalino Tartufato

Françoise Prévost : Elvira

Clive Revill : Charles, le parachutiste devenu agent secret

Gastone Moschin : l’avocat douteux

Giampiero Albertini : Ottone, le marginal

Jean Sobieski : Edward Stevens, le quaker 

SA 

Mots clés : Parodie – espionnage – guerre froide – cupidité – anti-héros

lesrusses

On peut comprendre que ce film de Luigi Comencini n’a pas eu les honneurs d’une programmation en France lors de sa sortie. Il est plutôt bâclé et on ne peut pas dire que le casting soit exaltant, en dehors de la prestation de Nino Manfredi, convainquant en prototype de l’italien moyen, fauché, entraîné, malgré lui, dans une aventure qui le dépasse. 

Manfredi incarne un ancien héros de la résistance italienne – il en existait donc – qui a sauvé un parachutiste anglais sur le point d’être exécuté par les méchants fachos italiens. Son nom est une promesse : Natalino Tartufato. Au temps où il était un héros, il a conquis la belle Elvira. 

Il a même été député, à la fin de la guerre, pour son action d’éclat. Malheureusement, il doit disposer du brevet pour être embauché à la Poste. Et là, c’est compliqué. Il sèche devant une équation, lors de l’examen, et s’efforce de copier la solution auprès d’un collégien à lunettes. Il obtient satisfaction en lui disant qu’il pourrait être son père. Hélas, le jeune garçon s’est trompé. 

Natalino va être recalé et sa carrière de fonctionnaire est compromise, alors que les fins de mois sont si difficiles.

Le ressort de l’intrigue est sciemment invraisembable, tout comme sont pathétiques les rebondissements. Les services secrets angloaméricains s’efforcent de faire abattre un jeune homme blond, présenté, contre toute vraisemblance, comme un revanchard nazi fomentateur de la Troisième guerre mondiale. L’affaire est si grave que ce doit être un inconnu, à savoir Natalino, retrouvé par Charles, le parachutiste passé aux services secrets anglo-saxons, qui doit abattre ce dangereux individu. 

Autant vous révéler le ressort de cette haletante intrigue, l’éphèbe blond est détenteur d’un formidable secret : il connait la composition chimique du Coca-cola, cette boisson qui rend les nord-américains et le monde civilisé heureux. En ces temps de guerre froide impitoyable, il est impensable que les russes bénéficient de cette source de bonheur. 

Le jeune homme, Edward Stevens, est, en fait, quaker bien que dans le secret de la composition du célèbre breuvage et, de ce fait, pénétré de sa mission humanitaire : il veut rendre les russes aussi heureux que les nord-américains et œuvrer de la sorte à la paix universelle, en leur révélant la formule magique. 

Soit-dit en passant, la religion quaker est assez ouverte du point de vue des relations sexuelles. Notre Edward Stevens (dans la vraie vie, ce fut le prénom et le nom d’un personnage historique. L’acteur falot qui l’incarne fut dans la vraie vie un amant de Dalida, la chanteuse à la voix rauque), notre Edward, donc, est un moment séquestré par Natalino. Il en profite, l’horrible pêcheur, pour coucher avec Elvira qui a toujours eu un faible pour les beaux blonds. Son Natalino avait été blond, avant de grisonner. Edward se repent devant Natalino qui aurait dû en principe le tuer. Il lui demande de le pardonner en chrétien. Natalino est un vrai cocu italien. Il a du mal. Le sensible Edward ne s’en remettra pas. Il se suicidera et c’est pour cela que les russes ne boiront pas du coca-cola. 

Vous croyez avoir appris beaucoup de choses de cette palpitante histoire mais, en fait, vous ne savez presque rien. Vous aurez la preuve que les italiens, bien que vénaux, n’aiment pas tuer pour l’argent. Ils préfèrent confier la mission à d’autres en partageant la prime. L’histoire met en valeur une brochette d’anti-héros : un avocat douteux, un marginal dépressif, un ambulancier, un autre pied-nickelé à la barbe en collier. Vous apprécierez également une variante du coup de la panne, bien que répétitive.

Comencini réussit à plomber le genre film d’espionnage. Il n’a pas eu l’opportunité, hélas, de s’intéresser aux films de superhéros musclés, aux films de science fiction, aux biopics en série, aux débats télévisés. Il est parti trop tôt.