Date : 2023      France

Durée : 93 mn

Acteurs principaux :

  • Alfred Dupontel : Pierre-Henry Mercier (PHM) et son jumeau, Santu
  • Cécile de France : Nathalie, la journaliste
  • Nicolas Marié : Gus, le caméraman
  • Catherine Schaub : la mère
  • Uri Gabriel : l’ongle, garde du corps
  • Bertrand Usclat : le chroniqueur France +
  • Christiane Millet : la chercheuse du CNRS
  • Renaud Van Ruymbeke : le juge Renaud
  • Jacky Berroyer : le savant écologiste
  • Philippe Duquesne : le « hacker gluant »
  • Scali Delperat : l’adversaire du débat

SA/HA

 

Mots-clés : Vie politique  – Gémellité – Dissimulation – Abandon - Apparences

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Il est inutile de chercher la vraisemblance dans un film de Dupontel : ce n’est pas le but. Ce qui est certain : ce film a sa place dans les DVD à montrer lors d’une hospitalisation brève, même si l’alcool est absent. Pourquoi ?

En premier lieu, le film stimule notre esprit critique, face à la tragi-comédie médiatico-politique qui se déroule en permanence sous nos yeux. Il utilise avec finesse l’arme de la dérision.

Les acteurs sont excellents et le rythme est endiablé. Dupontel assure le double rôle d’un candidat atypique et de son jumeau caché dans un coin des Cévennes. Le candidat est atypique parce qu’il est …sournois. Il propose un discours-baratin de droite modern’ style avec l’intention, une fois élu, de gouverner à gauche, tout au moins, avec des objectifs écologistes affirmés. Le contraire de ce qui s’est fait pendant longtemps en France : se faire élire sur un discours de gauche pour réaliser ensuite une politique conforme aux intérêts financiers.

Cécile de France, en journaliste binoclarde, aussi entêtée que curieuse, a un jeu très crédible. Le spectateur comprend, peu à peu, que son acharnement a des racines dans sa propre histoire. Son caméraman, puits de science du ballon rond, se laisse entrainer dans la folle enquête de Nathalie. La mère de PHM est parfaite en bourgeoise sans scrupules, ambitieuse par procuration. Le journaliste de plateau TV est une sorte de caniche satisfait. L’adversaire du grand débat télévisé est aussi bête qu’au naturel. Les gardes de corps de PHM sont aussi blondes que brutales. Dupontel joue le rôle du jumeau apiculteur, et cependant un peu niais, avec beaucoup de charme. Les flash-back sont réussis. Miracle : il n’y a aucune scène de sexe. Bref, c’est un bon moment de cinéma.

Secrets bien gardés et psychopathologie de la gémellité

Le film est intéressant et même profond sur le plan psychopathologique et sociétal.

Il permet ainsi d’évoquer le drame des enfants confiés à l’Assistance publique, à « l’orphelinat », d’autant qu’en Roumanie, à l’époque de Ceausescu et sans doute après, cela relevait du meurtre par abandon.

On imagine la cruauté infligée à la mère, réfugiée roumaine, domestique et enceinte (de qui ?). Sa riche patronne, sans doute stérile, choisit de garder celui des jumeaux qui répond le mieux à un test pour petit enfant, avant de laisser la mère retourner d’où elle était partie avec celui qui est en trop. Les jumeaux évolueront dans deux mondes opposés. L’un sera brillant et l’autre, une fois, retrouvé et ramené en France par un oncle taciturne, également garde-du corps du futur président, donnera une apparence d’attardé qu’il n’est pas.

Dupontel a l’obsession de l’abandon, figurée par la poubelle à humains (Cf Bernie). Il a aussi l’obsession du suicide par tiers interposé (Cf Adieu les cons), du suicide « utile », sacrificiel. Il sait aussi raconter des histoires d’amour avortées. La seule référence à une addiction vient de Nathalie, après la déception amoureuse de son adolescence. Pierre-Henry, jeune et beau garçon prometteur, n’était pas prêt.

La fin est douce-amère : Santu, le jumeau des Cévennes, gouverne à l’Elysée. Il a installé des ruches dans les jardins présidentiels. Il confie ses doutes à l’urne contenant les cendres de son frère. Nathalie est là pour le rassurer et, possiblement, réussir le transfert de son affection à celui qui, grâce à l’effacement volontaire, de son jumeau, a eu une seconde naissance.