Cynthia Fleury
Tracts Gallimard n°6
3€90, 39 pages
La découverte d’un tract revient à un tour de piste, une sorte de 400 mètres que l’on peut mener d’un seul tenant.
Face à un titre aussi évident – l’humanité nécessaire du soin – le plus simple est de s’interdire toute réflexion avant la fin : 39 pages, en recueillant ce qui a fait positivement écho.
Souligné au passage :
P 4 : « le manque de soin que les individus s’infligent à eux-mêmes. »
P 5 : L’attention portée à autrui »
P 6 : L’engagement éthique de l’homme
P 7 : L’exceptionnalité de l’homme, du côté du devoir de symbolisation et de sublimation »
P7 : bâtir une société qui ne soit pas celle du ressentiment
P7 : Rendre « capacitaires » les individus, c’est-à-dire redonner aptitude et souveraineté dans ce qu’ils sont
P 7 : Penser la vulnérabilité (comme une force potentielle)
P 10 : (L’absence de mots) n’est pas seulement l’impossibilité de traduire précisément ce que l’on pense. (Elle contribue à l’empêchement d’avoir une pensée propre).
P12 : « Nous vivons une nouvelle crise de la subjectivité ; la pression technologique et numérique tend à réduire le sujet à des données ; (le perfectionnement s’associe à l’idée « d’augmentation ».
P13 : L’enjeu du soin est « de consolider les capacités de l’individu, de l’accompagner dans sa réinvention des normes de vie, de lui suggérer l’entrée dans une dynamique de création »
P15 : Bruno Latour et son expression « d’acteur-réseau »
P16 : Luc Boltanski et la nécessité d’une sociologie critique, face aux censeurs, défenseurs des normes. Question sensible, s’il en est.
P10 : Dewey : « L’expérience, c’est ce qui nous protège de la fascination pour la certitude… connaissance, incertitude et faillibilité travaillent de concert » avec « l’obligation d’expérience, de vivre le savoir, de l’expérimenter »
P10 : « Ce rapport étroit entre faire, souffrir et subir forme ce qu’on appelle l’expérience »
P20 : « …prendre soin de quelqu’un, c’est prendre le risque de son émancipation, et donc de la séparation. C’est lui laisser le privilège de la coupure et pour soi, le sentiment d’abandon et d’ingratitude, inévitable.
P20 : « Ce sont des lieux où l’on pense par soi-même et pourtant avec les autres, où l’on façonne avec les autres, autrui et soi-même, des lieux qui deviennent indissociables des individualités qui s’y sont épanouies, et qui sauront, finalement accueillir d’autres singularités.
P20 : Le soin est une fonction en partage, relevant de l’alliance dialectique, créative, des soignants et des soignés, qui, ensemble, font éclore une dynamique singulière. »
P21 (est déterminant) « la reconnaissance subjective réciproque »
P22 : « l’expérience de la douleur (est) source de vérité et d’amélioration de l’humain.
P23 : « Veiller à ce que la vérité (l’annonce de la maladie) n’affaiblisse pas le sujet mais au contraire le renforce.
P23 : « La sollicitude permet une qualité d’écoute.
P24 : Il s’agit de « se soucier de l’accueil de cette vérité et de la « capacité » qu’elle doit mettre en place chez le patient lui-même.
P24 : « Veiller à ne pas techniciser son expertise comme ne pas dévaloriser celle du patient »
P29 : « Aucune guérison n’est retour à l’état antérieur »
P33 : « Les machines sont conçues par les hommes. Elles reproduisent leurs biais cognitifs »
Voici donc ce que j’ai glané dans ma lecture d’un seul tenant. La plupart de ces phrases renforcent ce que nous pensons et faisons ensemble, en consultations, en séance de groupe ou d’ateliers, dans le cadre de l’association depuis de plus de trente années. Tout ce qui est écrit est vrai, vérifié, mais en quoi ces constats validés par une universitaire éminente et reconnue changent quoi que ce soit aux conditions de notre pratique et de sa diffusion ?
L’heure n’est plus, depuis longtemps, aux dissertations, mais à la résistance et à l’interpellation.