19 septembre 2022

Jean Henriet à qui nous devons la publication du manuscrit par Dunod en a validé le titre. Il l’estime satisfaisant en raison de son caractère intrigant, incitant à la curiosité d’un public plus large. Qui plus est, c’est la raison même et la logique de construction du livre. Je propose de soumettre au groupe de parole. L’alcoologie relationnelle, titre écarté, est à retenir pour une conférence. Il est, enfin, logique que les membres actifs de notre association s’expriment sur cette thématique éducative inattendue. Je demanderai aux « anciens » de faire l’effort de participer à la séance. Qu’est-ce que le fait d’avoir été marqués plusieurs années par cette addiction leur a appris ? Le manuscrit proposera un paragraphe en écho de notre échange.

Je ne souhaite pas « tuer » ce thème mais je vais « remplir » mes lignes de présentation en évoquant ma propre expérience.

Le premier enseignement est d’ordre général et me fera citer encore une fois Jane Austen. La fréquentation attentive et prolongée d’un ensemble complexe, quel qu’il soit, est une source de connaissance non seulement pour cette entité mais encore pour toute autre entité complexe, par le phénomène de l’analogie. Jane Austen ne s’est jamais souciée d’analyser autre chose que le milieu dans lequel elle appartenait pour en dégager ce qu’il exprimait d’universel.

Que nous apprend de la vie la problématique addictive?

Elle nous enseigne qu’un choix est possible devant toute situation devenue insupportable. Il m’a fallu en avoir assez de la pratique relationnelle et économique imposée par ma condition de gastro-entérologue pour réorienter ma pratique professionnelle. Ma situation professionnelle m’amputait de nombreuses potentialités.

Elle nous apprend une multitude de choses : la force du déni, la banalité du clivage, le besoin d’être reconnu en faisant « comme tout le monde » dans le souci de s’en distinguer. Elle nous apprend l’indifférence foncière des autres quand leur intérêt n’est pas sollicité.

Si nous prenons la peine de réfléchir à la façon dont la société pourrait répondre au défi des addictions, nous ne pouvons que constater qu’elle s’en fiche, tout comme collectivement, elle se fiche de l’intérêt général, de l’écologie, de l’éthique. Elle instrumentalise habituellement ce qui a de meilleur pour le mettre au service de ce qui est le pire. Elle préfère le baratin à une parole engageante. Elle se rassure et s’épanouit dans la médiocrité.

L’addiction alcoolique a l’intérêt de nous faire sortir de nos zones de confort et, plus encore, d’inconfort, de nous faire abandonner, au moins un temps, la pensée paresseuse.

L’examen de l’offre de soin en alcoologie et en addictologie est exemplaire du fonctionnement sociétal. La prévention est inexistante. Le contenu du soin n’a cessé de s’appauvrir en trente ans.

Nous sommes soumis aux lois de l’économie légale et illégale. Les addictions constituent une façon d’anesthésier, de marginaliser et d’éliminer prématurément les populations. Qu’elles soient une source inégalée de malheurs pour qui en sont affectés et pour leurs proches, notamment les enfants est indifférent à ceux qui nous dirigent et à ceux qui en vivent.

Les addictions participent à la loi du silence.

La réponse aux addictions consiste à dessiner une ligne de résistance et de rupture, pour soi, pour ses proches, dans sa zone d’influence, en attendant mieux.

Les trois périodes de la relation à l’addiction (avec, sans, hors) restent utiles pour situer l’état de son esprit critique.

L’alcoologie nous apprend ce que nous voulons savoir et ce que nous préfèrerions ignorer.

Bref, que vous ont appris les addictions ?

Essayez d’être concis et précis.