13 mars 2023

Le passage du mardi pendant la dernière HBA, pour remettre le compte-rendu de la veille, m’a permis de questionner Catherine Dangelser sur les limites de la technique EMDR.

Catherine distingue les traumas « simples », tel qu’un viol (!), des traumas évocateurs de situations approchantes antérieures.

L’EMDR permet une « désensibilisation » devant le constat de « pensées dysfonctionnelles ».

Il a été question des personnes qui ont besoin de beaucoup parler. L’EMDR doit, donc ce contexte, être différé au bénéfice d’entretiens.

Les personnalités problématiques ne sont plus écartées, sous réserve d’être stabilisées, ce qui ne va pas de soi.

L’EMDR sert à débloquer un fonctionnement mental. Certaines personnes, même malmenées, n’en ont pas besoin.

En retour, j’ai précisé, à l’intention des participants qu’il fallait distinguer l’événement, en tant que tel, de son traitement mental et plus encore de son enfouissement dans l’inconscient. Ce qui fait problème, c’est l’enfouissement. Catherine a fait justement remarquer que l’enfouissement pouvait s’enkyster dans l’inconscient par l’amalgame avec un éprouvé de nature différente. Un relationnel dysfonctionnel peut ainsi donner corps à un événement traumatique qui aurait pu être vécu de façon banale, sans ébranler la vie mentale ou créer une pensée dysfonctionnelle. Les événements suscitent des émotions qui s’imbriquent avec des émotions plus anciennes. L’EMDR peut ainsi contribuer à débusquer des traumatismes plus anciens et moins spectaculaires que l’agression désignée comme trauma. Ce qui fait trauma – l’évènement qui s’enkyste et s’enfouit – dépend pour partie comment il est traité par l’environnement familial et, au-delà, par la société. Ainsi, en matière de violences sexuelles sur l’enfant, les adultes ont longtemps fait taire leur enfant, alors que les mettre en mots n’est jamais évident pour lui, qu’il soit un jeune enfant ou un adolescent. Avec l’essor des dénonciations scandaleuses, le problème peut aujourd’hui s’inverser et des adultes être accusés à tort, ce qui tendrait à montrer que la société participe à la création de pensées dysfonctionnelles.

Comme autre commentaire, je me réjouis que les structurations mentales proches des psychoses et des autismes ne soient plus écartées pour la bonne et simple raison qu’elles sont majoritaires dans la population souffrant d’addictions au même titre que les troubles du caractère bénéficiant d’appellations positives ou énigmatiques, telles que les « hauts potentiels » ou les « TDHA » comme si les difficultés de concentration, l’impulsivité et les émotions négatives justifiaient d’être considérées à part, comme une pathologie distincte. Il en est de même du pittoresque syndrome de Gilles de la Tourette où le sujet évacue un excès de tension mentale par des tics du visage ou du corps ou par un flot de paroles incontrôlées, avec possibilité de libération de mots obscènes. Une fois, le mot sur la chose, en quoi avons-nous progressé ?

La question des pensées dysfonctionnelles interroge à l’évidence les problématiques addictives et ce sera un des objets de notre séance d’essayer de les démêler.  

Une pensée dysfonctionnelle caractéristique concerne la personne dont on s’est moquée enfant parce qu’elle était boulotte ou parce qu’elle était beaucoup plus grande que ses camarades de classe ou encore parce qu’elle était différente en raison d’une différence quelconque : la couleur des cheveux ou celle de la peau, en raison d’une particularité physique, de son goût pour l’étude, en raison d’un talent particulier, rejeté par le groupe. Nombre de harcèlements scolaires ont ce type d’origine. La grégarité est source de normes stupides. Quand un harcèlement ne génère pas un drame, il peut susciter un vécu traumatique de dévalorisation, source ultérieure d’addictions.

Les pensées dysfonctionnelles ne se résument pas aux difficultés pendant l’enfance. Nous pourrions avancer l’idée que tout au long d’une vie, un individu doit subir l’impact de pensées dysfonctionnelles. Les pensées dysfonctionnelles d’origine sociétale vont constituer le véritable thème de notre réunion.