Lundi 04/06/2018

Il m’a été demandé de rapprocher les termes d’alcoolisme et de handicap.

La dépendance alcoolique peut être considérée juridiquement comme un handicap au même titre que d’autres addictions et que des manifestations caractérisées d’un point de vue psychiatrique. Nous disposons de la possibilité d’obtenir pour ces pathologies une exonération du ticket modérateur avec l’ALD. Relevons au passage que l’industrie pharmaceutique sait faire un bon usage de cette facilité dans nombre de secteurs de la médecine, y compris quand les médicaments proposés ont une efficacité faible et négligeable. Cette éventualité s’est vérifiée pour plusieurs molécules destinées à freiner l’appétence à l’alcool. Le procédé est aujourd’hui utilisé à grande échelle pour les personnes âgées souffrant de troubles cognitifs et de désorganisation mentale. Philippe Baquet dans son ouvrage « Homme augmenté, humanité diminuée » en fait la démonstration avec les retombées éminemment lucratives de la qualification extensive de maladie d’Alzheimer.

Voici ce que nous pouvons dire sur le lien de correspondance stricte entre les notions d’alcoolisme et de handicap. J’ajoute qu’il n’est nullement déshonorant de bénéficier d’une ALD pour une problématique addictive et pas davantage d’une Pension adulte handicapé à la MDPH. Je considère cette dernière comme participant à la base de sécurité indispensable à des patients souvent marginalisés par l’effet de leurs difficultés psychologiques ayant retenti sur leur insertion sociale.

Autrement, doit-on considérer la problématique alcoolique ou les addictions du même ordre comme un handicap ?  L’addiction sexuelle, à la mode des temps-ci, en est un exemple. Au fond, le risque de malentendu est du même ordre que le terme de maladie alcoolique. C’est la façon dont les conduites d’alcoolisation problématiques sont vécues par le sujet qui créent une sorte de handicap. L’ignorance des phénomènes à l’œuvre dans la constitution d’une addiction, les effets visibles de celle-ci d’un point de vue physique, familial et social, génèrent honte, dissimulation et souvent déni. Par ailleurs, nous pouvons admettre que l’inadéquation de l’offre de soin en alcoologie et en psychopathologie contribue à constituer en handicap le fait d’être malade de l’alcool. L’alcool est un symptôme mais aussi un révélateur des troubles émotionnels et cognitifs associés. Il les conforte souvent , tout comme il finit par aggraver les troubles psy préexistants. J’ai pu parfois dire à certains patients qu’ils étaient des handicapés de la relation, de la mauvaise opinion de soi à la phobie sociale caractérisée.

Comme il convient de terminer cette présentation sur une note positive, je dirai qu’être malade de l’alcool ne devrait pas constituer un handicap supérieur à une maladie psychosomatique tel, par exemple, que l’asthme. La chance d’un soin psychothérapique intelligent est de transformer ce qui, à un moment, a pu être un handicap en source de ressaisissement et de progrès. Nous voyons souvent qu’un handicap est source de résilience.

Vous considérez-vous comme une personne handicapée ? En quoi ?

Faites-vous un bon usage de votre différence ?