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Les fiches livres

160 000 enfants

Violences sexuelles et déni social

 

 

Edouard Durand

N°54

Tracts - Gallimard

30 pages

 G09188

160000 cas identifiés, chaque année, dans notre douce France. Les abus sexuels sur enfants font partie du quotidien. Lequel d’entre nous, garçon ou fille, à un moment ou à un autre, n’a pas été concerné directement par une situation d’abus ? Nous avons peut-être eu la chance d’avoir su la déjouer. Nous avons peut-être bénéficié des hésitations ou de la maladresse de l’agresseur ou d’un événement fortuit qui a mis fin à la tentative. Tous les enfants n’ont pas eu cette chance : un ado ou post-ado un peu plus âgé, y compris dans des endroits sordides, un ami de la famille, bien sous tous rapports, souvent, ou un proche très proche, par l’effet des recompositions de couple ou par inceste, ou plus banalement encore, par la suite d’une décision de justice ou des emplois des parents, sous l’effet de l’alcool mais plus encore par perversion sobre, confortée par la lâcheté ignoble du conjoint ou sa complicité active…

Le juge Edouard Durand expose cette réalité très clairement. Il montre comment le corps solidaire des bien-pensants parvient très souvent à faire prévaloir le déni, à retourner la charge de la preuve. Il donne des arguments forts contre cette perversion de la sexualité essentiellement masculine.

Chaque abuseur jette de surcroît le doute sur les diverses fonctions d’autorité qui facilitent les situations d’abus : les religieux, les enseignants, les éducateurs sportifs, les soignants, les N+1, +2, + 3, les professionnels de Justice, les détenus entre eux, mais également les copains de fête alcoolisée ou amplifiée par les substances psychoactives.

Il montre également combien il est nécessaire de démasquer, de débusquer et, en même temps, combien cet acte de salubrité publique est difficile à faire prévaloir. Celui par qui le scandale arrive n’est pas l’auteur du forfait. Le coupable est celui qui dénonce. L’abusé(e) aura, de surcroît, après avoir mené jusqu'au bout le processus de dénonciation, à dépasser sa position de victime pour avoir une vie normale. On conçoit la nécessité vitale d’associations mixant les statuts et les compétences pour rompre avec la loi du silence et de la honte ou de la culpabilité paradoxale.

Perversion, quand tu nous tiens…

Ces situations d’abus dénoncent les dominants et, plus spécialement, la gent masculine. Elles dépassent le cadre de la sexualité.

Il arrive, dans nos échanges de groupe, d’utiliser la notion de vignette clinique pour illustrer un propos général. Je résume ici une situation professionnelle qui détermina plus de deux années de tracas, d’humiliations, de dépenses d’argent, d’énergie et de temps. J’avais reçu, dans les règles de l’art, une patiente alcoolique, ex-toxicomane. Elle vivait assez loin de Toulouse. Elle n’avait pas de véhicule personnel. Elle avait deux enfants en très bas âge. Rapidement, elle m’avait apporté un texte qui décrivait l’indifférence et les pratiques pornographiques de son conjoint quand il rentrait du travail, l’état d’abandon dans laquelle elle se trouvait. Je ne suis pas aveuglément acquis à la cause des patientes qui critiquent leurs conjoints mais, cependant, j’étais dans l’incapacité de soigner cette femme. J’avais conscience que ses enfants étaient en situation de maltraitance. Cette femme voulait retrouver sa famille d’origine en Normandie, en amenant ses enfants avec elle. Je souhaitais aider cette femme et provoquer indirectement une intervention des services sociaux. J’inscrivais dans une attestation le récit dans ses détails et concluait, en prenant mes responsabilités de médecin : « Si ce qui est dit est exact, alors cette femme doit se soigner là où c’est possible, près de sa famille, car elle ne peut compter sur l’aide de ce qu’elle décrit comme un pervers. »

Pour cette conclusion qui me semblait logique, j’ai eu droit à des séances d’intimidation de l’Ordre des médecins du Département digne des régimes totalitaires, puis à une condamnation formelle par le niveau Régional. Mon avocate elle-même ne m’a pas défendue. Elle connaissait la musique. L’avocate de l’Ordre (J’avais attenté au principe de précaution !) a produit un discours qui faisait de moi un praticien malfaisant et irresponsable. Le petit bonhomme pervers qui avait essayé d’obtenir de l’argent de ma part pour amortir son divorce, avant d’exposer sa souffrance de calomnié à l’Ordre, était présent, fort marri au demeurant de ne pas toucher de l’argent. J’ai connu la situation humoristique d’être soumis à une expertise psychiatrique afin d’établir si j’étais en droit de continuer d’exercer. J’ai dû me rendre à Paris, à mes frais pour me présenter à l’Ordre National afin qu’il statue je ne sais exactement sur quoi. Dix ans plus tôt, j’avais été admis à rencontrer l’Ordre National pour valider ma conversion de gastro-entérologue en psychiatre aux seules fins de soigner plus confortablement les personnes en difficulté avec l’alcool, sur la base d’un dossier solidement étayé. J’y ai rencontré, une nouvelle fois, des médecins normalement bienveillants. Ils se sont en quelque sorte excusés, pour cette seconde fois, d’avoir été dérangés. J’en ai profité alors pour leur expliquer tout ce que ma réorientation professionnelle avait permis : une collection d’ouvrage utiles, l’affinement d’une méthodologie efficiente, des patients « libérés ».

Des années plus tard, j’ai appris que le président départemental, responsable de cet acharnement surréaliste, avait été condamné par l’Ordre National pour « harcèlement et violences psychologiques ». J’ai appris que mon confrère avait été cependant maintenu à son poste de conseiller régional par ses pairs. Pour ma part, je n’avais même pas pensé à porter plainte contre l’Ordre, ayant mieux à faire qu’allonger une procédure qui avait prouvé son degré de nuisance… J’avais identifié autour de ce confrère, que j’aimais bien et qui semblait m’apprécier, d’autres confrères bien pires. J’avais cru (et je n’ai pas changé d’avis) qu’il était manipulé par au moins un pervers de haute volée. Je le pensais seulement acquis au machisme présent au sein de la profession. J’avais estimé que certains collègues protégés par leurs fonctions d’autorité avaient dirigé l’offensive contre le médecin intellectuellement indépendant que j’étais, tant vis-à-vis de la caste machiste et conservatrice que de l’amicale des pervers quelconques.

La société inclusive

Parlons-en !

 Il n’y a pas de vie minuscule

Charles Gardou

Erès

14€50, 170 pages

lasocieteinclusive

 

Le titre est contre-intuitif. La société dans laquelle nous vivons est une machine à marginaliser, à normaliser, à catégoriser, à stigmatiser, à opposer. L’hypothèse de travail selon laquelle il y aurait une majorité de gens intégrés et une minorité d’exclus en souffrance ne rend plus compte de la réalité. La désorganisation, l’archipélisation et l’émiettement induits par la mondialisation est manifeste et affecte une grande majorité des citoyens.

L’auteur discute pour commencer le terme de « société inclusive » « aux multiples déclinaisons ».

L’auteur cite Jérémy Bentham, à propos de la déclaration des Droits de l’homme et du citoyen (1789) : un lieu commun abusivement mis en avant, « une absurdité montée sur des échasses ». Sans surprise, Gardou souligne l’accroissement des inégalités, la loi d’airain du marché, ou encore un consensus de façade ». Des îlots de commodité déploient des océans d’empêchement et d’exclusion. Il ajoute : « Vivre sans exister est la plus cruelle des exclusions ». Il conclut son prologue en rapportant que « Tout point de vue est l’avis d’un point », ce qui de notre point de vue est une invitation à multiplier les angles de vues.

L’évitement de ce qui dérange est une règle universellement appliquée. Il permet les défauts de soins, les abandons, les maltraitances et bien entendu le maintien des discriminations. Plus loin, il cite Gaston Bachelard : « Le réel n’est jamais ce que l’on pourrait croire mais ce que l’on aurait dû penser ». Pour Michel Foucault, « les sociétés se caractérisent selon la manière qu’elles ont de se débarrasser, non pas de leurs morts, mais de leurs vivants ». Cette référence date un peu. Notre modernité tardive généralise aussi la suppression des cimetières comme lieux de mémoire. L’évangéliste Matthieu nous annonce, en prenant le rôle du « méchant » : « car on donnera à celui qui sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas même ce qu’il a, lui sera retiré. » Cette sentence cruelle doit nous faire réfléchir. La pauvreté, la marginalisation sociale, le handicap identifié ne suffisent pas, il faut le mépris en plus. (C’est ce que nous disons à propos des personnes alcoolodépendantes, quand la marginalisation devient effective. Plus loin, l’auteur distingue le terme d’intégration. Pour lui le processus d’intégration consiste à rapprocher des éléments différents, en favorisant leur compatibilité et le fonctionnement de l’ensemble. C’est ce que nous nous employons à faire dans le respect des différences, même s’il existe des incompatibilités de fait.

Un nouveau chapitre énonce : « L’exclusivité de la norme : c’est personne, la diversité : c’est tout le monde ». Le titre d’une histoire imaginée par Boris Vian « on tuera tous les affreux » est explicité. Le héros de l’histoire, Mark Schutz, affirme : « et puis, on peut supprimer les gens qui présentent des défauts d’aspects. Ils sont conditionnés de telle façon que l’idée même de la laideur leur fait horreur. Le jour où ils s’aperçoivent de leur imperfection, ils se suppriment. Les gens sont tous très laids. Chez moi, un slogan : on tuera tous les affreux. » C’est ce que précisément les partisans de l’eugénisme ont préconisé. Madison Grant, auteur Nord-Américain du Déclin de la grande race (1926 – édité en France par Payot) inspira Hitler : 275000 enfants ou adultes affectés d’une déficience physique ou mentale furent assassinés dans un bref espace de temps pendant que se développait un programme de stérilisation sélective. Pour cet auteur, l’effacement de l’éthique et du souci d’universel n’est pas un symptôme du déclin.

Le déni de reconnaissance, l’indifférence et le mépris sont un chevalet de torture. Il en est de même de la dépréciation. Plus loin il fait allusion à la non-violence active (ahimsâ) de Ghandi. Martin Luther King se plaisait à dire : « Il nous faut apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons périr ensemble comme des imbéciles ». Nelson Mandela ajoutait : « L’opprimé et l’oppresseur sont tout deux dépossédés de leur humanité. »  Les amateurs de guerres fratricides devraient réfléchir à cette observation. Dans le film de John Ford « Vers son destin », Henry GFonda joue le rôle du jeune Lincoln. A un moment clé de l’histoire, il s’oppose à un groupe d’enfiévrés décidés à lyncher sans tarder deux accusés de meurtre, mis à l’abri dans la prison dans l’attente du jugement. Il déclare (approximativement) à la foule de citoyens individuellement raisonnables et pondérés, prêts à défoncer la porte : « On en pend un, puis un autre et on y prend goût et on se pend à tour de rôle… »

Le principe d’équité consiste à agir de façon modulée selon les besoins singuliers pour pallier les inégalités de nature et de situation. Pour Amartya Sem, avec sa théorie des capabilités, il est impératif de s’intéresser aux existences effectives ainsi qu’aux possibilités réelles de répondre aux besoins de chacun.

L’épilogue de cet opuscule définit la société inclusive comme « une société sans privilège sans exclusivité ni exclusion », ce qui peut sembler correspondre à une définition inversée du monde dans lequel nous vivons.

Gustave Flaubert écrivait à George Sand, en 1871 : « Il faut éclairer les classes éclairées commencer par la tête, c’est ce qui est le plus malade. Le reste suivra ».

L’expérience prouve qu’il est extrêmement difficile d’éclairer la tête et que le reste du corps social à bien du mal à suivre. À la fin de la lecture de ce petit livre, nous pouvons conclure que nous avons progressé en citations pénétrantes mais que nous n’avons pas avancé dans la compréhension d’une politique humaniste et réaliste du handicap, par définition multiple, protéiforme et relatif. Je ne crois pas que l’auteur a imaginé un seul instant qu’un handicap est multifactoriel et que les addictions font partie des handicaps socialement encouragés.

 

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